Résumé
Pedro tient une petite librairie de quartier dans le centre-ville d'une métropole brésilienne. Comme chaque week-end depuis six mois, pour retrouver Rosane, sa fiancée, il se rend en bus dans le quartier du Tirol, une banlieue délabrée à 40 kilomètres de là.
Le temps d'un voyage, alors que des rumeurs d'émeute attisent les tensions et font dévier le bus de son trajet initial, Pedro, dont les pensées vagabondent, nous livre un portrait sensible d'un Brésil méconnu. Dans son sac à dos, un livre bon marché sur le passage de Darwin dans son pays, qu'il lit par intermittence : la brutalité du monde animal et celle du monde humain se répondent.
Avis de lecture
Tout d'abord je remercie Anne et Arnaud et Books Editions de m'avoir permis de lire ce livre. Une critique positive (pour la lire, cliquer ici) sur le net m'a amenée à me porter candidate pour lire ce roman.
La construction de ce roman est atypique. Je ne me souviens pas d'avoir, un jour, lu un roman sans chapitres. Ce roman, du haut de ces 240 et quelques pages, ne nous laisse pas de répit en quelque sorte, et cela m'a troublée dans le sens où j'étais embêtée d'arrêter ma lecture à certains moments. En revanche cette construction peut s'expliquer : l'histoire commence alors que Pedro attend le bus et y monte. Au fil de ce long et incertain trajet vers Tirol, Pedro nous déroule le fil de ses pensées, sautant d'une histoire à l'autre pour rebondir ensuite sur ce qu'il se déroule autour de lui dans le bus, avant qu'un élément ne lui fasse penser à une histoire qu'il nous livre et ainsi de suite.
Si au fil de la narration, quelques longueurs m'ont lassée, il n'en reste pas moins que Rubens Figueiredo a une belle plume. J'ai notamment été sensible au soin apporté à chaque transition entre les diverses histoires que racontent Pedro, ou à la façon dont il nous ramène dans le présent, c'est-à-dire dans le bus. Par ailleurs, l'auteur nous livre le portrait d'un quartier porteur d'espoir pour ses nouveaux habitants, mais devenu un lieu de pauvreté, un lieu où règne une certaine insécurité en raison d'une rivalité avec un quartier voisin. Durant son trajet en bus, règne d'ailleurs une atmosphère inquiétante, les rumeurs d'une révolte, impactant sur le trajet pour rejoindre Tirol. A travers Pedro, c'est toute une palette de personnages, certains luttant pour s'en sortir (telle Rosane, la fiancée de Pedro, un personnage fort, ou la mère de celle-ci qui s'est battue avec les administrations pour obtenir une maison), d'autres se résignant et s'enfermant dans un quartier qui les broient.
Le résumé souligne un autre axe de lecture autour du livre de Darwin que s'attache à lire Pedro lors de son trajet. Ce livre qu'il a avec lui a une signification particulière dans l'histoire de Pedro, puisqu'il lui rappelle sa vie avant d'avoir sa boutique, le fameux accident à la cheville qui le marque à vie. Dans ce livre qui met l'accent sur le voyage de Darwin dans cette région du Brésil, Pedro nous raconte quelques scènes marquantes comme la fascination de Darwin pour les araignées et ses expériences, la scène avec un esclave. Et quant à cet écho entre la violence du monde animal et du monde humain, il est là, mais plus subtil qu'en laisse paraitre le résumé à mon goût.
Pour finir, j'ai apprécié que l'auteur s'attache à décrire Pedro en tant que lecteur : plongé dans la lecture de son livre, agacé par le manque de lumière dans le bus, concentré sur son livre avant que son attention soit détourné par un évènement extérieur ou une pensée. On peut se reconnaitre dans ses descriptions, d'ailleurs pas plus tard qu'hier, j'étais moi-même en pleine lecture dans le train et là, un tunnel et tout le wagon fut plongé dans le noir...