Résumé
A Kiev, Victor Zolotarev et le pingouin Micha tentent péniblement de survivre. Victor, journaliste, est sans emploi et Micha, rescapé du zoo, traîne sa dépression entre la baignoire et le frigidaire de l'appartement. Lorsque le patron d'un grand quotidien offre à Victor d'écrire les nécrologies - les "petites croix" - de personnalités pourtant bien en vie, Victor saute sur l'occasion. Un travail tranquille et lucratif.
Mais un beau jour, les "petites croix" se mettent à mourir, de plus en plus nombreuses et à une vitesse alarmante, plongeant Victor et son pingouin neurasthénique dans la tourmente de ce monde impitoyable et sans règles qu'est devenue l'ex-Union soviétique.
Avis de lecture
Voici un auteur ukrainien que j'ai rencontré au salon du livre de paris il y a quelques années, salon au cours duquel j'ai acheté son livre L'ami du défunt, un livre, très cocasse, que je recommande fortement.
Dans Le pingouin on retrouve cette atmosphère un peu absurde, avec un personnage qui se retrouve mêlé à une affaire qui le dépasse et dont il ne maîtrise rien du tout, pour la simple et bonne raison qu'il n'est pas au courant de grand chose hormis un point : les personnes dont traitent ses "petites croix" meurent. Elles ont toutes en commun d'etre des personnes importantes, influentes ayant commis de mauvaises actions. Qui orchestrent, qui tirent les ficelles de tous cela? Victor ne s'en préoccupent pas et est intimé de ne pas s'en préoccuper. Tout ce qu'il doit savoir est qu'il est protégé. Que de mystère ! Le pire est que malgré les dangers qu'il encourt, il ne s'inquiète pas, ne s'étonne pas et obéit lorsqu'on lui dit de se cacher quelques temps.
Un autre aspect étrange de ce roman est la façon dont se font les rencontres humaines et la rapidité autant que la superficialité des liens qui se créent. Ainsi Victor devient l'ami de Serguéï, un policier à qui il a téléphoné pour garder son pingouin durant son absence. Et que dire de Sonia, cette petite fille qui lui est confié (son père devant se cacher), une enfant avec qui il ne noue pas de véritable lien, qu'il considère pas comme un meuble, mais presque par moment à la manière dont il parle. Non, les interactions sociales ne sont pas son fort. Mais chacune de ses rencontres est une aventure en soi.
Malgré toutes ses petites aventures, sa petite vie n'en est pas trop troublé. Victor vit dans un appartement avec un pingouin, qu'il a repris à un zoo. Et ce pingouin, quel personnage ! Micha, le pingouin, est représenté comme mélancolique, faisant parfois des têtes comiques à son maître. Victor n'a pas cet attachement que l'on a pour son animal de compagnie, j'ai dû mal à trouver un qualificatif. Bref. Il s'en occupe, constate sa mélancolie, etc, s'en inquiète et cette inquiétude ne fait que croître jusqu'à ce qu'il découvre la maladie de son pingouin. En avançant dans la lecture, et notamment lorsque l'on arrive à la fin, le pingouin et Victor finissent par se confondre et il nous apparait alors que l'un peut être perçu comme le miroir de l'autre. En soignant Micha, Victor se soigne aussi en ouvrant les yeux sur sa vie. Tout commence par la présence suspecte d'un homme qui échange avec Nina (nourrice de Sonia et maîtresse de Victor). La suspicion s'empare de lui et il ne fera plus machine arrière.
Ainsi Victor est, ni plus ni moins, un outil entre les mains de personnes puissantes. Il fait ce qu'on lui dit et ne maitrise rien de ce qu'il découle. Dans Le pingouin nous suivons les aventures de cet homme naïf, gentil qui finalement essaie de survivre en faisant face ou plutôt en fuyant les menaces pour (sur?)vivre. C'est plus tard dans le récit, qu'il va faire face, sa mollesse se tranformant en détermination.
J'ai une nouvelle fois apprécié la plume de l'auteur. Le rythme du récit se veut lent, à l'image de son personnages peu réactif, mais pas ennuyeux loin de là. Et il y a des scènes très plaisantes comme les sorties du pingouin de l'appartement. Ce livre est un mélange d'absurde, d'humour compilé à des situations sombres. Un contraste savamment dosé et plaisant.
Pour finir, ce livre comporte une suite sous le titre Les pingouins n'ont jamais froid, que je lirais prochainement (mais quand...), en attendant je vous oriente aussi vers Babelio pour d'intéressantes critiques.